BRIL France-Yvonne
France-Yvonne Bril est partie rejoindre Henri Sauguet
« Vous allez faire carrière dans la nécrologie », vont me dire certains ! Quand les années sonnent à notre porte, peut-on faire reculer le destin, la vie et son cours naturel, a-t-on le droit de ne pas saluer nos chers aînés ? Ce monde veut vite oublier, ainsi que le chantait Offenbach, sur sa propre destinée finissante, dans son ultime opérette, Belle Lurette1:
Si de certains, on voudrait qu’il fût possible de les avoir ignorés, de quelques autres, il me paraît que nous ne devrions jamais effacer leur “sainte” et bienfaisante empreinte. Ainsi, je pense à Roger Delage, Marc Honegger, Pierre Ancelin, Adrienne Clostre et maintenant à France-Yvonne Bril.
Une nouvelle fois, en ce morose lundi 9 octobre, rassasiant en mauvaises nouvelles, j’apprenais par son amie Pierrette Germain-David, la disparition d’une autre grande Dame de la radio – de la grande époque de Radio-France, qui défendait si bien la musique française et où l’on osait faire entendre les compositeurs hors mouvance du « bocal Boulez/Ircam ».
De même que pour Adrienne Clostre, nous avions connu, Aurèle, Lionel et moi-même, France-Yvonne Bril, lors de la seconde partie du colloque consacré à Henri Sauguet, à Paris, en 2001. Cette manifestation était organisée par Présence Aquitaine Henri Sauguet, sous l’égide de son président Max Vidot, de madame Bouchet-Kervella et des éminents musicologues que sont Danièle Pistone et Bruno Berenguer.
Elle était, malgré ses soucis de santé et en particulier de graves difficultés de vue, venue une fois encore, nous parler de son ami Henri Sauguet. Elle fut, avec l’écrivain Marcel Schneider2, il faut s’en souvenir, l’une des toutes premières à parler de manière édifiante de Sauguet et de son œuvre. Il nous faut relire son texte remarquablement intelligent contenu dans le précieux Musiciens de tous les temps de la collection Seghers, publié en 1967. Mon exemplaire est celui que le compositeur adressait depuis sa maison de Coutras le 31 juillet 1967, « Au cher Robert Caby ». Autant dire la valeur sentimentale qui s’y trouve attachée ! Nous avons souhaité terminer notre hommage à la musicologue par un extrait de cet ouvrage.
Son intervention lors de ce colloque montrait sa fidélité au musicien affectionné, elle est disponible dans les actes de colloque3 publiés en 2003.
Ouvrons le triple numéro de La Revue musicale4 dédié à Henri Sauguet sous la direction du compositeur Pierre Ancelin qui m’en fit don. Ce n’est point une surprise d’y trouver un très beau texte sous la plume de France-Yvonne Bril, intitulé : Henri Sauguet et la musique lyrique.
Son intérêt n’était pas celui d’une dévote au culte de Sauguet, elle aimait plus largement la musique française contemporaine, celle qui touchait l’âme et le cœur.
C’est ainsi qu’elle accepta avec une grande gentillesse et une admirable modestie de participer, en 2005, à notre hommage à Alexandre Tansman5.
Fidélité, disponibilité, simplicité, compétence, efficacité, voici quelques-unes des qualités de celle qui vient de nous quitter. Sa manière de dire répond à ce qu’énonçait Montesquieu en sa onzième Lettre persane : « Il y a certaines vérités qu’il ne suffit pas de persuader, mais qu’il faut encore faire sentir. ». Voici pourquoi je vous laisse au délice de ses propres mots ; ils vont vous enchanter tant son talent d’écrivain, d’une élégance raffinée où une vraie culture – telle qu’il n’en existe qu’infiniment peu – se fond dans le propos avec le charme de la poésie. Vous y percevrez l’art de France-Yvonne Bril pour « faire sentir » ; son souffle poétique n’a rien à envier à celui qui se déploie à travers toute l’œuvre de son ami Henri Sauguet qui, lui, fut notre Schubert français :
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