PRESCHEZ Dominique
Dominique PRESCHEZ, né en 1954
écrivain et musicien français, à la fois poète, essayiste, organiste et compositeur
Jean Guillou
LE MONDE-ADEN
Né à Sainte-Adresse, en Normandie, Dominique Preschez est compositeur, organiste, et écrivain.
Premier Prix Pierre-Jean Jouve. Il est Chevalier de l’ordre des Arts et Lettres.
Il enseigne la Composition, et l’Improvisation, au Conservatoire International de Musique de Paris.
Son catalogue de compositeur compte trois symphonies pour orchestre, trois concertos — pour piano, pour harpe, pour trompette — et l’orchestre. Des œuvres lyriques : Shakespeare’s Sonnets, Tupac in memoriam, et Trois Fables en Une (Fables de Jean de La Fontaine.)
Plusieurs œuvres ont été créées par des solistes et amis : Jean-Yves Fouqueray, Thierry Pélicant, Joachim Leroux, Nicolas Brochot, Catherine Estourelle, Caroline Casadesus, le Quatuor Via Nova, Noël Lee, Raphaël Drouin, Annette Chapellière, Thierry Caens, Jason Meyer, Samika Honda, Sylvain Durantel, Thierry Barbé, Bertile Fournier, l’Ensemble Monsolo, Diastema, Yannaël Quenel, David Enhco, Françoise Levéchin-Gangloff, Danielle Laval, Sébastien Llinares, Elise Chauvin… Les Petits Chanteurs de Saint Marc de Fourvières, les comédiens Jean Piat, Jean-Claude Dreyfus, Guillaume Gallienne et Harold David…
Passion à Visage d’homme, Quatuor Nomade, Le Naufrage du Deutschland, Lunapark, Lily Concerto (à la mémoire de Lily Laskine), Deauville Symphonie, Hommage à Witold Gombrowitz, C.I.E.L.S, Lignes de fuite. Deux comédies musicales : Ali Baba et Trois Contes de Charles Perrault dédiés à la jeunesse. Trois œuvres à caractère sacré répondent à son engagement de musicien en église : Ave Maria (pour seize solistes a cappella) créé par le Coro da Camera de Lisboa, La Messe des Paroisses, dite de Saint-Augustin par les Chœurs de Haute-Normandie, I.N.V.I.O.L.A.T.A. par l’Ensemble Vocal Maurice Duruflé. Outre une discographie importante, en des domaines divers, paraît au printemps 2009 le double DVD Beklemnt (label : musique & mouvement) de son premier récital au Grand Orgue de saint Eustache (Cinquième Symphonie de L. van Beethoven, Vivaldi & Bach, W.A. Mozart & Improvisations, ainsi que clips et entretiens…) [5 Diapasons], puis Escales & Paysages pour Orchestre, piano principal et récitant de Dominique Preschez et Thierry Pélicant (création en 2011, Salle Gaveau) par l’Orchestre André Messager, le Pianiste Raphaël Drouin, récitant Dominique Preschez : direction Thierry Pélicant. Album double C.D Polymnie [www.escales-et-paysages.com]. En 2012 est paru chez Polymnie, No Man’s Land, musique de chambre par l’Ensemble Monsolo, et Laurent Molines, au piano. Le Concerto pour accordéon & orchestre : Court Métrage par Yannick Rogar, à l’accordéon & l’Orchestre André Messager, ainsi qu’une oeuvre originale : Concerto da Camera pour Guitare & Soprano, Quintette à cordes & Timbales vont faire l’objet d’un nouveau CD, à paraître chez Polymnie en 2017, accompagnés des Trois Mélodies pour Guitare et Soprano, éditées par Les Productions d’OZ, au Québec. Ces œuvres nouvelles sont interprétées par Sébastien Llinares, guitare, Élise Chauvin, soprano, Marie Charvet et Anne-Lise Durantel, violons, Cédric Lebonnois, alto, Julien Lazignac, violoncelle, Laurène Durantel, contrebasse, Jean-Marc Mandelli, timbales, sous la direction de Thierry Pélicant. En 2016, La Cuisine à l’alto – concert et spectacle gastronomicomusical – associant seize compositeurs d’aujourd’hui, a été publié par Polymnie. Les trois interprètes : l’altiste Sylvain Durantel, le pianiste Emmanuel Christien, et le récitant François Castang ont enregistré Fondants à la Viennoise de Dominique Preschez.
POUR DOMINIQUE PRESCHEZ
Andrée CHEDID, 19 décembre 2000
Texte initialement publié dans La lettre des Amis de l’orgue de Deauville, en janvier 2001
J’ai rencontré, il y a quelques années, le poète Dominique Preschez et ses mots clairvoyants. J’ai connu l’ami, attentif, généreux.
Aujourd’hui – bien que rien ne m’autorise à parler de musique — je découvre le compositeur.
J’écoute cette Deauville Symphonie et il me semble soudain que mon souffle s’accroît. J’écris à la suite, des mots qui viennent spontanément sous ma plume ; ceux-ci me parlent d’intensité souterraine, de profondeurs sondées et d’étincelles heureuses.
Je ressens, à cette écoute, la passion du tumulte des fleuves, en même temps que la découverte des sources. J’y trouve l’abondance, la luxuriance des forêts : mais aussi la délicatesse de la fleur en chacun de ses pétales.
Je m’y promène dans le présent, ce temps proche, contemporain et, à la même seconde, me voici au-delà des temps, à la racine d’un chant universel.
Je n’ai ni la compétence, ni le savoir musical qui me permettraient d’analyser cette oeuvre ; mais en l’écoutant il m’a semblé dépister quelques éclairs sur l’énigme de la Vie ; il m’a semblé apprendre à confronter ses aubes et ses nuits, ses soleils comme ses crépuscules.
De plus, j’ai senti que cette musique me disposait à mieux saisir cette Vie qui palpite à l’intérieur de chacun ; à mieux prêter l’oreille à cette humanité que nous efforçons de faire émerger de l’obscur.
Même s’il n’y a pas de but, cette musique-là est un ardent et lumineux chemin.
Sur Dominique Preschez …
Sébastien Llinares, mars 2017
On est mardi. Je donne mon hebdomadaire journée de cours au Conservatoire International de Musique de Paris. J’ai deux étudiants absents à la suite. Cela tombe bien car j’enregistre bientôt mon troisième disque et j’ai encore du travail. Notamment sur la Partita de Pierre Wissmer. Et aussi sur les Préludes d’Henri Sauguet. Je commence à jouer puis quelqu’un rentre dans ma salle :
- Ah ! Magnifique ! L’école de Paris ! A la guitare en plus ! Vous préparez quelque chose ?
Je suis surpris ! La musique que je joue, rarement connue des mélomanes et des musiciens, lui semble familière. Je remarque qu’il parle bien, qu’il a une voix juste. C’est le professeur de composition qui travaille dans la salle d’à côté. Je l’entends souvent jouer de folles transcriptions d’œuvres symphoniques qu’il semble improviser sur un piano beaucoup trop petit pour lui. D’emblée, je l’aime bien. Il parle comme une mélodie. Il joue comme il respire. Il vit en musique. Je commence à lui parler de mon projet discographique à venir. Il me répond :
-
Savez-vous que j’ai eu la chance d’étudier auprès d’Henri Sauguet ? Je l’ai rencontré par hasard sur une place en Grèce. Je l’ai reconnu et suis passé à côté de lui en sifflotant l’air des Forains. Nous avons fait connaissance comme ça. J’ai intégré son cercle et rencontré beaucoup de gens grâce à lui.
Les anecdotes se succèdent. On y croise Jean Wiener, Francis Poulenc, Germaine Tailleferre, Noel Lee, Jean Louis Florentz… Je suis sans voix. J’écoute et savoure. Le monde que j’imagine et que je fantasme par le biais de la littérature spécialisée et des partitions met un pied dans ma salle au conservatoire.
Depuis ce jour-là, avec Dominique Preschez, nous sommes amis. Sa musique ne peut se définir par un mélange d’influences. C’est une musique-monde. Ses partitions se lisent comme des palimpsestes, en strates successives comme autant de souvenirs qui dialoguent et s’entremêlent. Le langage, si personnel et original soit-il, permet la projection et l’identification immédiate car il semble regarder l’évolution du système tonal de haut. Musique méta tonale où l’on fuit le dogme sans se l‘interdire. On y reconnait certains paysages, mais on les voit avec un éclairage et un point de vue auxquels on n’avait pas accès jusqu’alors.
Son œuvre littéraire est marquée par la même hauteur de vue. Et par un fonctionnement on ne peut plus musical. Développement de cellules et improvisations autour de celles-ci ; sens de la narration et sens du laisser aller ; style aussi élégant qu’ excentrique, aussi délirant que charpenté. Une musique lettrée, une prose musicale et la poésie à tous les étages.
Dominique mène sa vie comme en musique. Lorsqu’il évoque ses maîtres, il parle d’accueil chaleureux, d’affinités électives, de développement des individualités. Tout est possible. La cité permet les rencontres. Nos désirs, qu’ils soient conscients ou pas, finissent un jour où l’autre par se projeter dans le réel. Parfois en douceur, parfois soudainement, brutalement.
Quand je suis arrivé à Paris en 1975, mon père m’avait loué un studio sans piano. Je me mets à la recherche d’un endroit pour travailler et un ami m’indique une splendide demeure à Saint Germain en Laye, avec quelques pianos dont un piano forte sur lequel Mozart avait composé. Je vais dans cet endroit merveilleux, je commence à travailler sur un des pianos. Puis, j’entends frapper à la porte, un homme élégant entre dans la pièce, nous commençons à échanger quelques mots, et je réalise que j’ai devant moi Benjamin Britten !
PASSION À VISAGE D’HOMME
de Dominique Preschez
Didier Lockwood
« Éclats », Festival de la voix au Pays de Dieulefit
17 septembre 2004
Lors du concert proposé par le festival « Éclats » de Dieulefit, j’ai été envoûté par la magnifique pièce de Dominique Preschez. L’écoute de l’enregistrement de ce concert a confirmé l’impression première.
Passion à visage d’homme est, au-delà de sa modernité, une oeuvre émotionnelle, puissante qui met en lumière l’immense talent du compositeur. Écrit sur mesure pour la voix de Caroline Casadesus, Passion à visage d’homme conjugue lyrisme et esthétisme. La voix de la soprano s’exprime dans toute sa chaleur et ses couleurs célestes… Il faut souligner la profondeur poétique de l’écriture d’Harold David qui donne un texte vibrant et dramatique. L’ensemble, soutenu par le très solide Nouvel Orchestre de Chambre de Rouen, sous la brillante baguette du très inspiré jeune chef d’orchestre Joachim Leroux.
Dominique Preschez nous donne une pièce d’une incroyable densité dans laquelle il semble se livrer tout entier à la limite du sacrifice, inscrivant son oeuvre au sein des incontournables du répertoire contemporain.
Soleils noirs
Dominique Preschez
Dominique Preschez a d’abord été écrivain. Héritée de Ives, Bartok, Hindemith, Milhaud, sa musique est habitée par la littérature, non seulement parce qu’elle donne voix à des textes littéraires, mais parce que la littérature n’a pour lui rien d’un prétexte.
C’est, bien au contraire, une manière de conjuguer deux visions du monde pour les porter à ce point où la signification est transfigurée, débouchant sur la pure célébration, que ce soit dans la pièce pour piano, Le Naufrage du Deutschland, d’après Hopkins, interprétée par le compositeur, dans Lunapark pour orchestre à cordes (le Nouvel Orchestre de chambre de Rouen), hommage au Pasolini des ragazzi, petits voyous qui peuplent ses films et ses écrits, dans Passion à visage d’homme, monologue pour voix et orchestre, chanté ici par la soprano Caroline Casadesus sur des textes d’Harold David qui réinventent la passion christique en un homme contemporain cloué sur un lit d’hôpital. Dans Santa Maria, l’orchestre à cordes suggère avec lyrisme une scène maritime aperçue par le compositeur à Honfleur : musique plus évocatrice que descriptive, et tout à fait heureuse. Avec Passion à visage d’homme, l’oeuvre la plus ambitieuse est Quatuor nomade magnifiquement interprétée par le quatuor Via Nova : 4 mouvements qui, pour ce genre si redouté des compositeurs depuis Beethoven, s’inscrivent dans une tradition avec laquelle elle joue, rendant hommage à certains prédécesseurs (notamment Kurtag, Ligeti), et déployant tout un monde intérieur, tour à tour heurté, méditatif, lumineux.
Dossiers
Poésie, écriture :
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